Dans les brumes /Carnet de Terrain
4 mars 2022, Ă  la Terrasse-sur-Dorlay.
Mme Montagne
Captations de savoir-faire au musĂ©e des Tresses et Lacets avec Didier Lazzareschi – employĂ© du Parc – et Michel Linossier – ancien peignier.


Vers quinze heures, Ă  la sortie du musĂ©e des Tresses et Lacets, avec Michel et Didier, nous partons visiter les nouveaux ateliers d’artistes, la Turbine CrĂ©ative. Sur le parking, Michel Linossier me propose de contacter Mme Montagne, une ancienne ouvriĂšre tisseuse. Elle a travaillĂ© pendant plusieurs annĂ©es aux tissages Schmelzle Ă  l’usine Perrier.
Il sort son tĂ©lĂ©phone, appelle sa femme pour obtenir le contact. Le hasard fait que Mme Montagne est justement Ă  ses cĂŽtĂ©s. AussitĂŽt, il me tend le tĂ©lĂ©phone. De l’autre cĂŽtĂ©, une voix dure, les questions fusent et torpillent « Qu’est-ce que vous me voulez ? Vous ĂȘtes qui ? Quel est votre lien avec Josette ? ». Un peu dĂ©contenancĂ©e, je me prĂ©sente en tant qu’étudiante en design travaillant sur du patrimoine textile du Parc du Pilat. La voix s’énerve. « Y a rien Ă  dire. »
Un silence. Puis la voix revient, s’emporte, beugle « Ça n’a aucun intĂ©rĂȘt, le tissage est mort ! Venez pas dĂ©terrer le passĂ©, vous n’avez rien Ă  faire lĂ  ! Je refuse de vous parler. Je refuse qu’une connasse vienne fouiner dans ma vie. ». La haine dans sa voix me gifle, je n’arrive pas Ă  rĂ©pondre, j’éloigne le tĂ©lĂ©phone de mon oreille et le rends Ă  Michel, abasourdie. Il parle Ă  sa femme, de son cĂŽtĂ©, Colette Montagne lui a jetĂ© le tĂ©lĂ©phone et est partie sans plus d’explications. IncomprĂ©hension. Je n’arrive pas Ă  m’empĂȘcher de pleurer.
Michel ne comprend pas sa rĂ©action. Plus tard par mail, il explique que Colette est revenue prendre le thĂ© mais qu’elle n’a pas parlĂ© de l’incident. Pas un mot. Peut-ĂȘtre un passĂ© trop douloureux.

Plus tard, lors d’un repas chez Betty et Pierre, ils s’étonnent « Pourtant, elle s’entendait bien avec Josette, elle est mĂȘme dans un film en train de travailler au mĂ©tier Ă  tisser. À ma connaissance, elles n’étaient pas brouillĂ©es Ă  la fermeture de l’usine. Mais bon, elle vient d’un milieu trĂšs dur. Elle s’est mariĂ©e avec un Montagne, une famille trĂšs prolo, dure, ouvriĂšre. Autour des Montagnes, il y a toujours des embrouilles. ».
Plus tard, Didier et Michel m’envoient d’autres contacts de tisseuses et gareurs.